Nuremberg, Anton Koberger, 8 novembre 1491.
In-folio de (353) ff., signés a-z6 (a6 blc), ab-ad6, ae8, A-Z6, Aa-Gg6, Hh10 (Hh10 blc), pts. trous en marge des 4 premiers ff., gde. initiale enluminée au f. aiiii verso, ancien petit travail de vers dans la marge intérieure des cahiers x, y et ab sans atteinte à la gravure, infime mouillure angulaire aux ff. 310-311 et 340. Le dernier feuillet Hh10, blanc, n’a ici pas été conservé. Le texte, orné d’une grande initiale enluminée, a été rubriqué en rouge et bleu.
Veau brun sur ais de bois, plats décorés d’un décor estampé à froid de motifs végétaux et animaliers dans des encadrements de filets, aux angles et au centre, cinq bouillons de cuivre, sur le premier plat, titre de l’ouvrage [Schatzbehalt D’Ewige Seligkeit] en lettres dorées usées, dos à nerfs orné d’un motif de roses à froid répété, tranches naturelles, traces de fermoirs ouvragés. Petits défauts à la reliure. Reliure de l’époque.
329 x 228 mm.
Première et unique édition de ce célèbre incunable mystique allemand relatant la vie du Christ, imprimé seulement à 150 exemplaires, selon la tradition.
Le texte fut écrit par les Sœurs de l’Ordre de Saint-Clare à Nuremberg et édité par les Sœurs de la Charité à Pirckheim.
Hain 14 507 ; Copinger I. p. 431 ; Panzer D. ann 313 ; Brunet v. 193 ; Proctor 2070 ; Polland II. p. 434 ; Muther 423 ; Dogson I. p. 240-245 ; Passavant I. 67 ; Fairfax-Murray II. 392 ; BMC II. 434 ; Stillwell S. 280.
L’un des plus beaux et des plus célèbres incunables illustrés.
Cet ouvrage avec la Chronique de Schedel (1493) est l’un des « two first important books with original illustrations published at Nuremberg ». Dogson I. pp. 241.2.
Der Schatzbehalter oder Schrein der wahren Reichtümer des Heils und der ewigen Seligkeit genant [Le Gardien du trésor, dit Écrin des vraies richesses du Salut et du Paradis éternel] a paru en 1491, à Nuremberg.
Le Schatzbehalter précède de deux ans la Chronique de Nuremberg.
Il est dû au moine franciscain Stephan Fridolin (ca 1430-1498), alors prêcheur des sœurs clarisses de la ville, mort en 1498. Empreint de théologie, l’ouvrage repose sur la vie du Christ. C’est le principal livre de l’auteur, qui mit ici à profit son immense érudition, acquise tout au long de ses activités de prédicateur et de lecteur dans les couvents de Bamberg, Mayence et, à partir de 1480, de Nuremberg.
Sorti des presses d’Anton Koberger, l’ouvrage, après le Breydenbach de 1486, passe pratiquement pour être le premier livre illustré en Allemagne au XVe siècle, dont on puisse attribuer avec certitude les figures à un artiste célèbre, plusieurs planches portant la signature de Wolgemuth.
L’iconographe absolument superbe se compose de 96 grandes figures gravées sur bois, à pleine page (252 x 176 mm), spécialement dessinées pour le texte.
Dues à Michel Wolgemuth (1434-1519), le Maître de Dürer, elles témoignent d’une grande maîtrise de l’artiste dans la composition des différentes scènes, la richesse d’expression des visages et le précis des détails notamment vestimentaires et de la vie quotidienne.
D’autres sont l’œuvre de Guillaume Pleydenwurff, d’artistes de l’atelier de Wolgemuth et peut‑être de Dürer lui-même.
Michel Wohlgemuth occupa une situation considérable à Nuremberg et semble y avoir été considéré comme le peintre le plus éminent de son temps.
« Dürer qui était son élève lui voua une telle admiration qu’il peignit son portrait à 2 reprises, la deuxième fois alors qu’il était âgé de 82 ans. » Benezit X 778.
Cette superbe suite de tableaux différents consacrés à la vie du Christ permet à Wohlgemuth de traduire en des scènes puissantes les épisodes majeurs de la Bible et du Nouveau Testament : Paradis Terrestre, Moïse, Abraham, Nativité, Fuite en Égypte, Baptême du Christ, le Christ chassant les marchands du Temple, la Cène, la Passion, le Jugement dernier…
Beaucoup de scènes extérieures sont campées devant des paysages, places fortes fortifiées ou construction du temps…
Outre les principaux protagonistes, de nombreux autres personnages se meuvent dans des décors nettement architecturés ou des paysages, dont le rôle est à la fois ornemental et symbolique.
Une infinité de détails savoureux concernent l’architecture intérieure, l’armement, les vaisseaux, les moyens de transport et les usages de l’époque, les banquets et les costumes du XVe siècle, notamment la mode vestimentaire des femmes.
Superbe exemplaire à grandes marges, très pur et d’un beau tirage, conservé dans sa reliure d’origine.
Réalisée à Nuremberg, elle est à rapprocher, par son vocabulaire ornemental (oiseau, griffon, rosace, branchage) d’un Boèce appartenant à la fondation Schäfer et du Schatzbehalter provenant de la bibliothèque J. R. Ritman.
Provenance : ex-libris du baron Ferdinand Hoffmann (1540-1607), gravé par Lucas Kilian (1579-1637) d’après M. Göndolach. Ferdinand Hoffmann, seigneur de Grünbüchel et Strechau, avait réuni une collection de livres composée de plus de dix mille imprimés et manuscrits ; il avait acquis en bloc la bibliothèque de Hieronymus Holzschuher, célèbre médecin de Nuremberg et ami de Dürer, qui avait lui-même hérité de la bibliothèque de son beau-père, Hieronymus Münzer, médecin, cartographe et collectionneur de livres de sciences ; Prinz Ferdinand von Dietrichstein (?) (1628-1698), à qui les héritiers d’Hoffmann donnèrent la bibliothèque de leur aïeul et qui, en 1669, la fit déplacer au château de Nikolsburg en Moravie (deux ventes furent organisées en novembre 1933, et juin 1934 mais aucun des catalogues ne mentionne l’exemplaire) ; Paul Harth (ex-libris) (vendu 44 673 € le 1er mars 1987 il y a 32 ans, par Sotheby’s) ; Pierre Bergé ; Marc Litzler.
Goff S-306 ; GW 10329 ; BMC II 434 (pour un ex. en reliure de l’époque ; dim. : 333 x 233 mm) ; Arnim, Katalog der Bibliothek Otto Schäffer, 1,302 (« L’édition passe pour avoir été tirée à environ 150 exemplaires ») ; Muther, 423 (« The first book produced by the Koburg press with illustrations that were certainly prepared under the supervision of Wolgemuth is the 1491 ‘Schatzbehalter oder Schrein der wahren Reichtümer des Heils und ewiger Seeligkeit’ ») ; Needham, Twelve Centuries of Bookbindings, 400-1600, n° 30, note 9 et n° 92 ; Schäfer, Europaïsche Einbandkunst Aussechs Jahrhunderten, n° 15 ; Seaver, Maps, Myths, and Men. The Story of Vinland Map, Stanford UP, 2004, pp. 339-352 (« A Moravian Castle Library »).