Les Fables de La Fontaine en « édition princeps » sont : Le Renard anglois, Le Renard et les Poulets d’Inde, Le Philosophe Scite, Le Rat, le Corbeau, la gazelle et la tortue, Le Fou et le sage, L‘Eléphant et le singe de Jupiter, La Folie et l’amour et Le Singe.
Superbe exemplaire « Labedoyère », cité par Brunet, relié en maroquin rouge ancien
de Derome le jeune de l’édition princeps, inconnue de Tchemerzine et Rochebilière,
des fables de La Fontaine paraissant dans ce volume.
Amsterdam, 1690.
La Fontaine (1621-1695). Esope en belle humeur, ou derniere traduxion, et augmentacion de ses Fables. En Prose, & en Vers.
Amsterdam, Antoine Michils, 1690.
In-12 de 360 pp. et (4) ff. « Les pages 1 à 14 ne sont pas chiffrées. P. 1, frontispice : Ésope récite ses fables au milieu de la campagne, en s’accompagnant d’une sorte de vielle qu’il tient sous le bras droit et qu’il actionne de la main gauche. Les animaux l’entourent et un singe, près de lui, porte un bâton, terminé par quatre ailes de moulin à vent, autour duquel s’entoure une banderole portant ces mots : Esope en belle humeur. Dans un cartouche, en bas de la gravure, se lisent ces vers :
Venez à la leçon, jeunesse vive et folle,
Ésope en belle humeur vous appelle, à l’Écolle ;
Les Bestes autrefois parloient mieux que les gens,
Et le siècle n’a point de si doctes régens.
p. 3, titre en deux couleurs, à la Sphère, pp. 5 à 14, préface, pp. 15 à 16, Vie d’Esope, pp. 17 à 360, Fables, 4 ff., Censure de l’ordinaire. » (Rochambeau).
Maroquin rouge, triple filet, dos lisse orné de filets pleins et perlés, tranches dorées sur marbrures. Reliure attribuable à Derome le jeune.
149 x 87 mm.
Edition princeps de toute rareté, inconnue de Tchemerzine et Rochebilière, des fables de La Fontaine paraissant dans ce volume imprimé en 1690.
Elles seront publiées la première fois sous le nom de La Fontaine dans le cinquième et dernier volume de la première édition collective en l’année 1694 soit quatre années plus tard, imprimée et corrigée sous sa direction, et considérées par les bibliographes comme paraissant pour la première fois.
Ces fables de La Fontaine en « édition princeps » sont : Le Renard anglois (p. 275), Le Renard et les Poulets d’Inde (p. 284), Le Philosophe Scite (p. 288), Le Rat, le Corbeau, la gazelle et la tortue (p. 295), Le Fou et le sage (p. 298), L ‘Eléphant et le singe de Jupiter (p. 301), La Folie et l’amour (p. 336) et Le Singe (p. 351).
L’édition est illustrée d’un frontispice et 155 superbes gravures sur bois non signées. Regravées pour l’édition de 1700, elles seront alors signées Jacobus Harrewijn (On a monté en tête une gravure intitulée Les Fables d’Esope Phrygien, édition de Claude Carteron en 1687 ?).
De La Fontaine, le censeur Momus raconte dans la postface (4ème feuillet après la page 360) : « La Fontaine me pria d’ajouter que la pluspart des fables qui entroient en ce nouvel ouvrage n’avoient pas été imprimées avec celles qui avoient paru sous son nom puisque la fantaizie lui étoit venue de faire ces dernieres à la vue de l’aprobacion que le public donnoit aux premieres. ».
Et dans la préface, feuillet A6 : « mais pour ne point contrister La Fontaine qui a si heureusement travaillé sur les Fables, on fut d’avis d’y joindre, quelques-unes de ses plus belles. »
La Fontaine, ayant emprunté à quelque autre, Esope ou Phèdre, un « sujet », son acte créateur consiste dans l’invention d’une forme, et c’est par là qu’il se montre et qu’il se fait le très grand artiste complet qui se donne ses conditions, se trouve ses moyens, et tend toujours plus sûrement vers l’état de pleine possession et d’équilibre de ses forces. Ce progrès se voit dans ses recueils successifs de Fables (1668-1678-1694). La forme par lui créée est d’une souplesse extraordinaire. Elle admet tous les tons du discours, passe du familier au solennel, du descriptif au dramatique, du plaisant au pathétique, et ménage ces modulations à tous les degrés qu’il faut, selon l’ampleur ou la minceur du thème à mettre en œuvre. Un des succès les plus heureux de cette liberté d’exécution se manifeste dans la combinaison inattendue de l’observation la plus fine et la plus juste des allures et des caractères des animaux, avec les sentiments et les propos humains qu’ils doivent affecter d’autre part. C’est une remarque devenue banale que celle du traitement de l’apologue en comédie – parfois très petite comédie, mais toujours d’une vie et d’une vérité admirables. Il arrive que ce petit théâtre sur lequel le montreur présentait, agitait et faisait parler les marionnettes à plume et à poil, s’élargisse tout à coup et retentisse d’accents lyriques de la plus haute résonance. Mais tout ceci n’a été possible que par la vertu de cette forme poétique qui est et qui demeure l’incomparable création de La Fontaine. C’est au système des « vers variés » que nous faisons allusion.
La Fontaine nous apprend à connaître la vie, à ne pas être dupes ; il nous enseigne la prudence ; il nous corrige de travers ridicules ou odieux ; il montre que nous avons intérêt à ne pas nous laisser aveugler par la vanité, l’ambition, la cupidité.
Combien les contemporains goûtèrent La Fontaine, les nombreuses éditions des Contes et des Fables l’attestent (pour les Fables, 37 éditions en vingt-sept ans, de 1668 à 1695), et les éloges venus des milieux les plus divers : Mme de Sévigné, Bussy-Rabutin, Chapelain, Baillet, Perrault, Bayle, La Bruyère, Cureau de La Chambre lui-même. Fénelon, grand admirateur des Anciens, le compare, c’est tout dire, à Térence et à Virgile. « La Fontaine n’est plus ! II n’est plus, et avec lui ont disparu les jeux badins, les ris fôlatres, les grâces naïves et les doctes Muses… ». Rév. J-P. C.
La traduction d’’Esope en belle Humeur’ est l’œuvre de l’historien flamand J.C. Bruslé de Montpleinchamp, qui se fit aider de Furetière et de La Fontaine.
Les quelques volumes contenant des fables de La Fontaine en édition originale sont recherchés des bibliophiles. Ainsi deux exemplaires de l’édition infiniment moins rare des « Ouvrages de prose et de poésie des sieurs de Maucroy et de La Fontaine », Paris, Claude Barbin, 1685, 2 tomes, in-12 avec 10 fables de La Fontaine en première édition, furent-ils respectivement vendus :
. 7 500 € relié en simple veau à la vente J. Guérin en 1988, il y a 33 ans,
. 14 000 € relié en maroquin de l’époque il y a 25 ans (Paris, Juin 1996, n°120).
Magnifique exemplaire cité par Brunet relié en maroquin rouge ancien de Derome le Jeune provenant de la bibliothèque Labedoyère de l’une des plus rares éditions originales présentant des Fables inédites de Jean de La Fontaine.